Le confinement est débuté depuis si longtemps - toujours resté sur une corde incertaine - le voyant aujourd’hui tenter de briser son existence par pas provocants peurs et joies, joies et peurs et encore incertitudes au pluriel - que je me demande comment est la vie autrement. Je me demande, ai-je déjà vécu entièrement hors confinement ? Hors confinement, ai-je ces plages d’espaces, ces plages d’espaces sans trop d’anxiété ? Dès le début du confinement, j’ai passé d’une ligne métropolitaine à une ligne insulaire. Par grand hasard de vie, grand hasard tourné vers ce que je suis au plus franc de moi. J’ai dû me déplacer pour monter une exposition qui ne verra jamais le jour dans les yeux des visiteurs-poètes. Une exposition qui sommes-toutes existe en elle-même. Hier soir, j’ouvrais un journal intime illustré datant de la fin 2017 et d’une grande part de 2018 et en premières lignes, je trouvais ces mots : <<laisser vivre les objets>>. Je trouve que ça résonne bien avec la manière dont j’accepte de voir la vie de mon exposition <<Îles>> au Musée acadien du Québec à Bonaventure.
Laisser vivre les objets. Se laisser vivre aussi. Je veux dire par là, depuis quand avons-nous réellement le contrôle sur nos vies, le fait de vivre n’implique-t-il pas justement d’être bouleversé pour pouvoir apprendre encore en traversant la route qui est la nôtre ? Je trouve, pour ma part très étrange, ce désir de contrôle et de retour à la normale ou l’anormale. Je ne vois pas ce qu’il y a de sain dans notre vie capitaliste ... certaines et certains diront que si ce n’était pas cela ce serait autre chose et ce ne serait pas mieux. D’autres jamais ne se questionnent sur notre manière humaine de concevoir objets et vie, notre vie par les objets. Et si nous laissions vivre les objets et si nous prenions le temps de poser le pied dans notre vie, celle qui se joue maintenant, pas celle qu’on attend de vivre, qu’on a déposé sur le bord du comptoir ou d’une table, il y a deux mois, non notre vie riche riche riche et intérieure. Notre grand voyage singulier, unique et personnel. Celui qui ne demande pas d’avion ou de vêtements particuliers, celui qui se joue dans l’émerveillement de l’ici et maintenant. Je parle oui, en femme privilégiée, je sais que ce n’est pas le lot de toutes et tous. Je le sais, sans le vivre. Il faut se battre. Mais se battre ne peut-il pas aussi se jouer dans le non désir de revenir à cette vie anormale où perdue nous ne devenons que frissons d’anxiété. Nous devenons tous ces insectes angoissés par la température, le temps, notre rendement, cette image de soi dans la vitre.
Je me demande, je me questionne, du nid de mon lit, avant même que ne rosisse le ciel. Peut-être ai-je encore manqué le lever du soleil. Ça en fait un de moins d’inscrit dans ma mémoire. Un levé de soleil qui ne reviendra plus.
Je voulais à la base parler de ma manière de confinement près des grandes étendues, quelque part loin du jeu des drames. Pour inspirer aux gestes plus simples, plus doux. Mais d’abord pour mettre des mots. Trouver les mots pour dire.
Au tout début du nouveau jeu de table présenté par la pandémie, je ne savais pas, comme les autres, comment exprimer cette impression d’irréalité. Car d’un seul coup, tous repères s’effondraient et devant l’incertitude et l’inconnu, comment nommer, trouver un sens, savoir où mener le prochain pas. Je cherchais les mots, la tête pleine d’espaces vides.
Avant la pandémie, ma vie tournait et se retournait autour d’une tempête de peurs dont je tentais de m’éloigner pour respirer. Rester centrée. Prendre part à ma vie encore et encore soutenue par mes désirs, mes rêves, cette notion honnête envers <<je>>.
Dès qu’elle a éclatée, une grande part des peurs s’est envolée. Parce que la plupart de mes peurs n’en sont pas réellement, elles sont plutôt le visage de ce qui n’est pas naturel pour moi. Je m’efforce de prendre le moule et je me romps et me suis infidèle. Et parce que je n’accepte pas si facilement cette infidélité, je me rends malade d’une manière franche et féroce qui brime mes heures, ignore mes jours, m’arrache mon énergie vitale.
Confinée, je vis loin des peurs. Oui, certaines restent, mais je me sens plus forte qu’elles parce que je reste dans l’action. En cessant d’être immobilisé par mes peurs, j’ose concevoir un présent et un futur à l’image de ce que je sens être la nature de <<je>>. Je tente de tracé de nouvelles marques. Je tente la respiration pleine. Je <<tente ce qui tente>>, comme j’aime bien me le rappeler. Expression empruntée à l’artiste Sylvie Cotton.
En étant artiste, je converse ce cœur enfantin, celui qui marche avec curiosité d’un point à un autre. Ce que je veux dire c’est qu’étant artiste j’apprends chaque jour à vivre avec ce qui est, ce qu’on me présente. La vie comme du matériel à transformer, à jouer, à fabriquer, à créer. Je joue avec l’accident, le hasard, je m’émerveille devant ce qui naît ici et là, les yeux grands ouverts, brillants, habités.
Je crois que c’est une philosophie de vie, impossible a déposé en chacun. Certains tentent d’y approcher par diverses substances <<ce soir, je me lâche lousse>>. D’autres par le sport ou la méditation <<lâcher prise, moment présent, respiration pleine conscience>>. Mais tout ça revient à la même chose, tenter de vivre ce qui est. Tenter de prendre le train en marche, parce que l’histoire, notre histoire continue de s’écrire, le temps de glisser dans le sablier, notre vie de se vivre.
Pour moi, art et vie, vie et art restent indissociables. C’est ainsi que je décide de percevoir la chose. Je crée pour vivre et je vie pour créer. Alors pour vivre confinée, je me suis rapidement offerte une liste de défie à réaliser sans obligation, sauf celle de voir vers où tout ceci pouvait me mener. J’ai délaissé les projets d’envergure, qui sans être méchants, donnent davantage le ton à une vision du monde capitaliste, pour me pencher vers la recherche et création de manière fluide, naturelle et respectueuse de mon rythme personnel et de ma position dans ma vie et surtout auprès de la nature qui me redonne ma vraie place, il me semble. Auprès d’elle je ne puis plus me leurrer et me garnir le visage et l’esprit de choses volubiles, non, avec elle, je m’imprègne dans le réel, égale aux côtés des arbres, des oiseaux, de la mer, des astres et du vent. Certes, il s’agit d’une vision de la vie. D’une forme de spiritualité. De croyance intime. Bien sûr on me juge, j’inspire et je dérange. Mais de nature, et je l’accepte, je me mets au service du beau et de l’étincelle créative. De nature, je dirais, mélancolique, mais aussi rêveuse, je semble souvent vivre en deçà, ignorante du réelle et pourtant, je crois qu’au contraire, c’est d’une conscience aiguë du monde qui me fait et m’entoure, dont je me fais porte-parole par actes visuels et poétiques.
Le confinement, je le vois comme l’espace-temps d’une visite privilégiée en mon île secrète, en mon archipel d’îles. Je me visite et me fait, me fabrique et m’apprend. Je suis reconnaissante de ce lieu de rencontre en moi. Je ne dis pas là vivre un rêve, je reste femme dans le réel, réel agrémenté de peurs encore, d’incertitudes encore, de maux de corps humain, etc. etc.. Mais encore plus, je vis de la curiosité d’être et de partager vos êtres en devenir, peut-être plus rapidement qu’à l’ordinaire, nous devenons. Nous devenons une version de nous coïncidant avec les marées de l’époque dans laquelle nous progressons.
Laisser vivre les objets. Se laisser vivre aussi. Je veux dire par là, depuis quand avons-nous réellement le contrôle sur nos vies, le fait de vivre n’implique-t-il pas justement d’être bouleversé pour pouvoir apprendre encore en traversant la route qui est la nôtre ? Je trouve, pour ma part très étrange, ce désir de contrôle et de retour à la normale ou l’anormale. Je ne vois pas ce qu’il y a de sain dans notre vie capitaliste ... certaines et certains diront que si ce n’était pas cela ce serait autre chose et ce ne serait pas mieux. D’autres jamais ne se questionnent sur notre manière humaine de concevoir objets et vie, notre vie par les objets. Et si nous laissions vivre les objets et si nous prenions le temps de poser le pied dans notre vie, celle qui se joue maintenant, pas celle qu’on attend de vivre, qu’on a déposé sur le bord du comptoir ou d’une table, il y a deux mois, non notre vie riche riche riche et intérieure. Notre grand voyage singulier, unique et personnel. Celui qui ne demande pas d’avion ou de vêtements particuliers, celui qui se joue dans l’émerveillement de l’ici et maintenant. Je parle oui, en femme privilégiée, je sais que ce n’est pas le lot de toutes et tous. Je le sais, sans le vivre. Il faut se battre. Mais se battre ne peut-il pas aussi se jouer dans le non désir de revenir à cette vie anormale où perdue nous ne devenons que frissons d’anxiété. Nous devenons tous ces insectes angoissés par la température, le temps, notre rendement, cette image de soi dans la vitre.
Je me demande, je me questionne, du nid de mon lit, avant même que ne rosisse le ciel. Peut-être ai-je encore manqué le lever du soleil. Ça en fait un de moins d’inscrit dans ma mémoire. Un levé de soleil qui ne reviendra plus.
Je voulais à la base parler de ma manière de confinement près des grandes étendues, quelque part loin du jeu des drames. Pour inspirer aux gestes plus simples, plus doux. Mais d’abord pour mettre des mots. Trouver les mots pour dire.
Au tout début du nouveau jeu de table présenté par la pandémie, je ne savais pas, comme les autres, comment exprimer cette impression d’irréalité. Car d’un seul coup, tous repères s’effondraient et devant l’incertitude et l’inconnu, comment nommer, trouver un sens, savoir où mener le prochain pas. Je cherchais les mots, la tête pleine d’espaces vides.
Avant la pandémie, ma vie tournait et se retournait autour d’une tempête de peurs dont je tentais de m’éloigner pour respirer. Rester centrée. Prendre part à ma vie encore et encore soutenue par mes désirs, mes rêves, cette notion honnête envers <<je>>.
Dès qu’elle a éclatée, une grande part des peurs s’est envolée. Parce que la plupart de mes peurs n’en sont pas réellement, elles sont plutôt le visage de ce qui n’est pas naturel pour moi. Je m’efforce de prendre le moule et je me romps et me suis infidèle. Et parce que je n’accepte pas si facilement cette infidélité, je me rends malade d’une manière franche et féroce qui brime mes heures, ignore mes jours, m’arrache mon énergie vitale.
Confinée, je vis loin des peurs. Oui, certaines restent, mais je me sens plus forte qu’elles parce que je reste dans l’action. En cessant d’être immobilisé par mes peurs, j’ose concevoir un présent et un futur à l’image de ce que je sens être la nature de <<je>>. Je tente de tracé de nouvelles marques. Je tente la respiration pleine. Je <<tente ce qui tente>>, comme j’aime bien me le rappeler. Expression empruntée à l’artiste Sylvie Cotton.
En étant artiste, je converse ce cœur enfantin, celui qui marche avec curiosité d’un point à un autre. Ce que je veux dire c’est qu’étant artiste j’apprends chaque jour à vivre avec ce qui est, ce qu’on me présente. La vie comme du matériel à transformer, à jouer, à fabriquer, à créer. Je joue avec l’accident, le hasard, je m’émerveille devant ce qui naît ici et là, les yeux grands ouverts, brillants, habités.
Je crois que c’est une philosophie de vie, impossible a déposé en chacun. Certains tentent d’y approcher par diverses substances <<ce soir, je me lâche lousse>>. D’autres par le sport ou la méditation <<lâcher prise, moment présent, respiration pleine conscience>>. Mais tout ça revient à la même chose, tenter de vivre ce qui est. Tenter de prendre le train en marche, parce que l’histoire, notre histoire continue de s’écrire, le temps de glisser dans le sablier, notre vie de se vivre.
Pour moi, art et vie, vie et art restent indissociables. C’est ainsi que je décide de percevoir la chose. Je crée pour vivre et je vie pour créer. Alors pour vivre confinée, je me suis rapidement offerte une liste de défie à réaliser sans obligation, sauf celle de voir vers où tout ceci pouvait me mener. J’ai délaissé les projets d’envergure, qui sans être méchants, donnent davantage le ton à une vision du monde capitaliste, pour me pencher vers la recherche et création de manière fluide, naturelle et respectueuse de mon rythme personnel et de ma position dans ma vie et surtout auprès de la nature qui me redonne ma vraie place, il me semble. Auprès d’elle je ne puis plus me leurrer et me garnir le visage et l’esprit de choses volubiles, non, avec elle, je m’imprègne dans le réel, égale aux côtés des arbres, des oiseaux, de la mer, des astres et du vent. Certes, il s’agit d’une vision de la vie. D’une forme de spiritualité. De croyance intime. Bien sûr on me juge, j’inspire et je dérange. Mais de nature, et je l’accepte, je me mets au service du beau et de l’étincelle créative. De nature, je dirais, mélancolique, mais aussi rêveuse, je semble souvent vivre en deçà, ignorante du réelle et pourtant, je crois qu’au contraire, c’est d’une conscience aiguë du monde qui me fait et m’entoure, dont je me fais porte-parole par actes visuels et poétiques.
Le confinement, je le vois comme l’espace-temps d’une visite privilégiée en mon île secrète, en mon archipel d’îles. Je me visite et me fait, me fabrique et m’apprend. Je suis reconnaissante de ce lieu de rencontre en moi. Je ne dis pas là vivre un rêve, je reste femme dans le réel, réel agrémenté de peurs encore, d’incertitudes encore, de maux de corps humain, etc. etc.. Mais encore plus, je vis de la curiosité d’être et de partager vos êtres en devenir, peut-être plus rapidement qu’à l’ordinaire, nous devenons. Nous devenons une version de nous coïncidant avec les marées de l’époque dans laquelle nous progressons.